PubGazetteHaiti202005

12 janvier 2010: guides de construction parasismique établis par l’Etat et le cas Canaan

Photos credit: C-PRIM et Wikipedia


Le 12 janvier 2010, Haïti a été frappé par un puissant séisme de magnitude 7,3 à l'échelle Richter. Une catastrophe qui a causé la mort à environ 200 000 personnes selon Oxfam, et a fait de milliers de blessés graves et détruit également de milliers de maisons. Des maisons pour la plupart qui ne répondaient pas aux normes de construction parasismique, selon les réponses des autorités après la catastrophe. De 2010 à 2022 quant est-il de la situation des maisons construites dans le pays au regard des guides de construction parasismique élaborés par les autorités, le cas de « Canaan ».

Après le tremblement de terre du 12 janvier 2010, les citoyens ont envahi plusieurs espaces qui étaient auparavant inhabités. L'État haïtien a également eu recours à ces endroits dans l'idée de construire des maisons pour abriter 1,3 millions de sans-abris créés par le cataclysme, l'exemple de Morne à Cabrit. Mais, les initiatives de construction prises par les citoyens en ce sens laissent présager des doutes sur la préparation des maisons réparées, construites, reconstruites face à d'éventuels séismes.

Le cas Canaan

La poussière soulevée au quotidien par les pas et les caoutchoucs des camionnettes fréquentant la route. Il y a des maisons complètement bâties, déjà habitées. D'autres inachevées, et certains terrains abritent seulement le sol et d'autres sont clôturés. « On dirait qu’il fait plus chaud dans cette zone », se plaint en passant un chauffeur. Nous sommes à Canaan pour une comparaison des maisons avec « les guides de construction parasismique de l'État haïtien ». Canaan, « désert » avant, est une récente bidonville, créée après le séisme du 12 janvier, sous l'œil des autorités étatiques, dans la commune de la Croix-des-Bouquets.

Les maisons et les guides

La plupart des maisons, grandes ou petites dans cette zone, niveau 1, 2 et 3, ont été construites après la terrible catastrophe du 12 janvier par des maçons et les ouvrages élaborés également par un maçon, a expliqué un chauffeur de taxi-moto, habitant la zone. Maçon en Haïti, dans l'opinion des communs des mortels, sous-entend que c'est quelqu'un qui n'a pas fait d’ études universitaires en génie civil et qui a appris son métier sur le tas.

Certains constats démontrent que Canaan aujourd'hui présente la même architecture de construction observée dans les autres bidonvilles, et la même que celle qui existait dans les années antérieures au tremblement de terre meurtrier du 12 janvier. 

Certaines de ces maisons sont construites les unes à côté des autres, ne respectant pas la distance minimale de 1.5 m, reconnue par l'État haïtien. Certaines n'ont qu'une porte d'entrée et une sortie sans les deux poteaux en béton qui doivent servir de bordures. Et, certains des poteaux en béton armé ont été construits avant même les murs de maçonnerie des maisons. Ce qui rendra en conséquence les murs de ces quelques maisons instables, si l'on suit l'analyse du « guide de renforcement parasismique et paracyclonique des bâtiments ». De plus, l'eau des pluies a l'habitude d'abîmer le sol de certains de ces habitats, indique un jeune riverain. Une situation qui est due, en partie, à l'absence de canaux d'évacuation.

L'essentiel dans la construction d'un bâtiment ou une maison qui pourrait résister aux d'éventuels séismes, c'est qu'il doit avoir « une bonne transmission des efforts sismiques jusqu'aux fondations », expliquent les autorités haïtiennes dans leur « guide de renforcement parasismique et paracyclonique des bâtiments », élaboré après le séisme du 12 janvier. C'est-à-dire, tout le poids de la maison doit être transmis à la fondation (le sol) en cas de secousses sismiques. 

Chainages et sable

Voilà, à Canaan il est facile de retrouver deux murs en maçonnerie qui se rencontrent entre eux pour former un des angles de quelques maisons. Cependant, ces murs devraient être cimentés ou reliés entre eux à travers un poteau en béton armé, comme l'exige le guide. Des poteaux qui joueront le rôle de chainages verticaux entre les murs de contreventement de la maison. 

Selon un propriétaire de deux chambres dans la zone, la plupart des murs des maisons des « gens pauvres » ont été construits à partir du mortier à base de sable blanc (type la boule) que de sable de silice, conseillé par les dirigeants. Il explique qu'il est plus facile d'acheter le sable blanc car il est moins cher. En effet, les murs érigés avec ce type de sable sont considérés par l'État dans « le guide de renforcement parasismique et paracyclonique des bâtiments » comme ayant une mauvaise qualité pour résister au séisme.

En outre, plusieurs maisons niveau 1 à toitures en tôle ne possèdent pas de chainages supérieurs horizontaux, recommandé par l'État dans le guide. Les chainages sont les poteaux qui entourent les murs de forme carrée de tous les côtés et qui relient également les murs entre eux. 

Avec cette comparaison, il est constaté que 12 ans après le tremblement de terre la façon de construire, particulièrement les « gens pauvres », reste la même, notamment à Canaan. En effet, en suivant le guide mis en ligne par les autorités haïtiennes sur « les bonnes pratiques pour la construction de petits bâtiments en maçonnerie chaînée en Haïti », plusieurs plans observés dans les maisons de Canaan n'ont pas respecté les prescrits du guide en question.


Les Guides utilisés:

MTPTC, Guide de renforcement parasismique et paracyclonique des bâtiments

MTPTC, Guide de construction de petits batiments à maçonnerie chaînée

 


Juhakenson Blaise

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