
Du haut de son statut de sénateur, Andrice Riché l’homme de la grande Anse est beaucoup plus fameux pour ses punchlines plutôt que ses capacités à légiférer encore moins à prodiguer des conseils avisés à un président de la République. Considéré comme un bouffon par plus d’un, spécialement pour ses capacités à faire rire, le sénateur Riché n’en demeure pas moins un personnage énigmatique dans l’univers politique et médiatique haïtien. La tradition judéo-chrétienne veut qu’on garde sa langue dans sa bouche à défaut de l’avoir dans sa poche sous prétexte, qu’un bon chrétien doit suivre l’exemple du Christ d’après Mathieu 5 « Si quelqu'un te gifle sur la joue droite, laisse-le te gifler aussi sur la joue gauche. » Andrice Riché contrairement aux affirmations de son Christ rédempteur, n’hésitera pas à vous prendre les deux yeux si vous lui prenez un œil ou toute la bouche si vous lui arrachez une dent car avec le pasteur-Sénateur on ne badine pas.
Dans un interview accordé à Gazette Haïti au cours de son pèlerinage au Bénin dans le cadre du Vodou Day, histoire, dit-il, de renouer avec ses racines, Andrice Riché a mis l’accent sur son enfance vécue dans la misère pour expliquer l’importance de la culture Vodou dans la vie du peuple haïtien, quelle ironie ! Plus loin il a affirmé pince sans rire, qu’a côté du dieu blanc qu’il a vénéré et adoré toute sa vie, il existe d’autres dieux en faisant l’apologie du polythéisme. Il semblerait en tant que pasteur, Andrice Riché n’a jamais lu Exode 20 verset « Tu n’auras pas d’autre dieu devant ma face »
Bien que venant d’une famille de vodouisant le bon vieux Andrice trouve des raisons abracadabrantes pour justifier sa vie pastorale. J’ai failli mourir de rire ! Et finalement, selon le Sénateur Riché, le vodou serait la clef permettant de résoudre tous les problèmes auxquels nous faisons face aujourd’hui. La situation du Sénateur Riché n’est pas singulière quand on sait que le christianisme est pour certaines personnes un tremplin pour rompre avec la pauvreté à défaut d’être une porte ouverte vers le paradis céleste, tandis que pour d’autres, il est une bouée de sauvetage comme dit Maurice Sixto dans Zabelbok leur permettant de divorcer définitivement avec la misère. Ainsi ce bon vieux Andrice nous apprend que toutes ses années de pratique religieuse et de profession de foi chrétienne étaient « boul chit »
On a de bonnes raisons d’être critique par rapport à Andrice Riché pour ses pirouettes quand il était au Sénat de la république. Membre important de l’organisation du Peuple en Lutte (OPL), il s’est rapidement converti en défenseur zélé du Parti Haïtien Tête Kalé (PHTK) avant de vendre son âme à Jovenel Moise en devenant grand conseiller. Ces changements de position et de positionnement s’expliquent aisément. Chrétien, Andrice devait, au lieu de militer au sein de l’OPL qui est un regroupement de Centre gauche, se trouver un bon petit parti Démocrate-Chrétien à l’instar de la Fusion des Socio-démocrates. Le problème avec le pasteur Riché est qu’il joue pour gagner, ce qui n’est pas mauvais en soi et l’OPL dans sa grand Anse natale était le ticket gagnant. Le Sénateur est pareil au larron droit de la bible chrétienne qui savait exactement comment flatter l’ego du Christ sur la croix pour obtenir le salut grâce à ses stratagèmes. Andrice en bon chrétien sait comment caresser l’animal dans le sens du poil pour obtenir à défaut d’un salut éternel certains privilèges matériels. La vie éternelle attendra !
L’attitude d’Andrice Riche vis-à-vis de sa foi chrétienne et de ses convictions vodou met en exergue la problématique chez le chrétien haïtien et ses difficultés à naviguer au sein de ce syncrétisme dans lequel il n’arrive plus à savoir qui il est vraiment. Est-il un chrétien faisant profession de foi dans un christ mort sur la croix pour ses prétendus péchés ou au contraire un vodouisant rendant hommage à des esprits et des loas ancestraux ? Malheureusement, le sénateur- pasteur n’arrive pas du haut de ses 78 ans à savoir qui il est et où se positionner. Il est chrétien quand ça lui arrange et vodouisant pour les besoins d’une cause dont nous ignorons les tenants et aboutissants. Par-delà le comportement ambigu et franchement confus du pasteur sénateur Riché, il faut poser le problème des croyances religieuses dans la société haïtienne.
Avec le débarquement des colonisateurs espagnols ayant à leur tête Christophe Colomb qui comme disait Maurice Sixto dans « j’ai vengé la race » débarquaient avec le fusil dans une main et la croix dans l’autre, la société indienne s’est retrouvée plongée dans une spirale infernale qui, en moins de 10 ans, va provoquer le génocide des indiens qui vivaient heureux et en paix dans leur ile de rêve. Ce génocide de la population indigène va contraindre les colonisateurs espagnols puis français a amené de l’Afrique des esclaves noirs qui vont apporter dans leurs bagages la croyance dans les dieux ancestraux et les loas. Plus tard, le concordat de 1860 signé entre l’église catholique romaine et l’Etat haïtien sous Fabre Nicolas Geffrard va consacrer de façon quasi définitive la prise en charge de l’Etat par l’Eglise avec les conséquences que nous connaissons aujourd’hui encore. Depuis, il y a une lutte incessante entre le vodou et le christianisme qui affecte à tour de rôle et de façon négative le quotidien de l’homme haïtien.
La société haïtienne contrairement aux sociétés modernes reste un environnement archaïque ou les dieux et les loas font la pluie et le beau temps. Cette sacralisation de l’espace haïtien à travers un envahissement continu des dieux, des loas, des prophètes, des chérubins ou toute sorte de diseurs de bonne aventure, constitue une forme particulière et primaire du sous-développement. Un pays ne peut se développer avec des divinités, des esprits, des loas ou toute autre forme de croyances mystico-religieuses. Le développement se fait à l’instar des pays, tels la Chine, les Etats-Unis, le Rwanda ou plus près de nous la République Dominicaine, avec de la science, de la culture et le respect scrupuleux des règles de droit. Partez en pèlerinage en Afrique pour se ressourcer relève de la démagogie dont a toujours fait montre Andrice Riche tout au long de sa vie. Le vodou tout comme le christianisme ne peut nous tirer du marasme politique, économique, social et environnemental dans lequel nous nous sommes mis depuis trop longtemps.
Cette énième repentance du pasteur Andrice Riche avec ce pèlerinage dans les fins fonds de l’Afrique prouve s’il en était besoin qu’il est à la recherche non pas de ses racines mais plutôt de lui-même. Sa misérable tentative de soi-disant se ressourcer dans la culture vodou après une longue expérience chrétienne, sans remettre en question ses croyances antérieures, est la preuve qu’il est resté égal à lui-même. Sa transition subite du vodou au christianisme puis du christianisme au vodou ressemble fort à propos à ses pirouettes politiques le menant de l’OPL au PHTK puis a Jovenel Moise sans jamais fait de mea culpa. Au Sénateur pasteur et aujourd’hui vodouisant Andrice Riché, je dis au nom de la population NO MORE BULLSHIT.
JEA, New York Mars 2025.
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