
La rentrée scolaire pour l’année académique 2025-2026 s’est tenue ce mercredi 1er octobre 2025 dans plusieurs communes du pays. À Delmas et à Pétion-Ville, de nombreux élèves ont retrouvé le chemin des classes dans un climat de vigilance sécuritaire. Mais à Port-au-Prince, la reprise demeure incertaine, marquée par les séquelles de la violence armée et par la fermeture prolongée de plusieurs établissements.
Dès les premières heures du matin, Delmas a offert une image rassurante de la rentrée. Devant l’école Saint-Louis de Gonzague, des foules d’élèves accompagnés de leurs parents se pressaient dans la cour, sacs à dos flambant neufs et uniformes bien repassés. L’école Jean-Marie Guilloux, anciennement située au centre-ville relocalisée à Delmas 33, a également ouvert ses portes sans encombre. Pour beaucoup de parents, cette rentrée symbolise un retour à une certaine normalité après des mois d’incertitude.
Afin de sécuriser le déroulement de la journée, un important dispositif policier a été déployé. Plusieurs unités de la Police nationale d’Haïti (PNH) étaient visibles aux abords des établissements, facilitant la circulation et rassurant les parents. Toutefois, la réalité du quotidien n’a pas disparu, dans les rues de gros tas d’ordures encombraient encore des artères principales, ralentissant la circulation.
À Pétion-Ville, c’était le même constat , même si les effectifs paraissent moins impressionnants. Au Lycée national de cette commune, le directeur, Jean-Marc Charles, a accueilli les élèves avec beaucoup d'optimisme. « L’école, par définition, c’est une grande famille. Nous sommes heureux de voir nos élèves revenir », a-t-il déclaré. Selon lui, l’établissement accueille entre 1 750 et 1 800 élèves par vacation, et les responsables espèrent une année scolaire constructive malgré les défis.
De plus, sur la rue Panaméricaine, l’école Marguerite d’Youville s’est distinguée par une rentrée colorée. Les élèves, fièrement vêtus de leurs uniformes, ont fait forte impression. L’ambiance y était festive, traduisant la volonté des parents de maintenir l’éducation de leurs enfants malgré les difficultés économiques et sociales.
Si Delmas et Pétion-Ville ont donné des signes d’espoir, Port-au-Prince a offert un visage bien plus sombre. Dans plusieurs quartiers, la reprise scolaire est restée au point mort. Peu d’établissements ont rouvert leurs portes, et ceux qui l’ont fait fonctionnaient avec un nombre limité d’élèves.
Par ailleurs, le Collège Canado-Haïtien, le Collège Saint-Pierre et l’école Foyer Social ont timidement relancé leurs activités et le Collège Saint Louis de Bourdon a accueilli ses élèves mais dans les rues du Champ-de-Mars, autrefois centre névralgique de la rentrée scolaire, le constat est alarmant : presqu’aucune animation, les espaces habituellement bondés étaient presque vides sans activité scolaire.
Cette absence d’activités scolaires traduit les profondes blessures laissées par la violence des gangs armés dans la capitale. Plusieurs écoles détruites par les bandits n’ont toujours pas été réparées, faute de moyens financiers et de stabilité sécuritaire. Pour des milliers d’élèves, la rentrée n’a pas eu lieu. « Quand on voit ces écoles fermées ou en ruine, on comprend que l’avenir de nos enfants est suspendu », confie une mère rencontrée près du centre-ville.
La rentrée 2025-2026 révèle une fois de plus les inégalités criantes entre les communes relativement stables et celles sous l’emprise des violences. À Delmas et Pétion-Ville, malgré les obstacles, les enfants peuvent encore rêver d’une année scolaire normale. À Port-au-Prince, en revanche, des milliers d’élèves restent privés d’éducation, une réalité qui accentue le sentiment d’abandon et la fracture sociale.
La rentrée scolaire de ce 1er octobre met en lumière l’un des plus grands défis actuels d’Haïti : garantir à tous les enfants un accès à l’éducation dans un contexte marqué par la violence, la pauvreté et l’instabilité politique. Entre les élèves enthousiastes de Delmas et Pétion-Ville et ceux de Port-au-Prince contraints à l’attente, le contraste est saisissant.
Arnold Junior Pierre
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