PubGazetteHaiti202005

Leslie Voltaire « coupe la tête » de Garry Conille et retourne le pouvoir au CPT

Voltaire et Conille

Fort d'un prétendu support de l'international, Garry Conille se comportait en véritable chef de la transition au mépris du conseil présidentiel de transition. Surestimant sa force face au CPT qui l’avait choisi comme premier ministre, il a fini par avoir sa « tête coupée » comme ce fut le cas en 2012 avec Michel Martelly. 12 ans après, il n'a clairement tiré aucune leçon du passé. Garry Conille a été éjecté par Leslie Voltaire qui s’est montré intraitable dans sa volonté de rapatrier le pouvoir à la présidence.

Le malaise entre les deux branches du pouvoir était toujours palpable mais tout a déjénéré lors de la dernière assemblée générale de l'ONU quand le premier ministre Conille et la ministre des affaires étrangères Dominique Dupuy ont été accusés d’empêcher le conseiller-président Leslie Voltaire, aujourd’hui président du Conseil Présidentiel de la Transition (CPT) de participer à une rencontre bilatérale avec le président Brésilien Lula Da Silva. Face à ce camouflet, le représentant de Fanmi Lavalas au conseil, de New-York étant, avait annoncé la couleur. « Des têtes vont être coupées », avait-il déclaré, dénonçant « un coup d'état diplomatique » contre le CPT.
Une fois arrivé en Haïti, il a convoqué Dominique Dupuy pour fournir des explications sur les cafouillages diplomatiques enregistrés aux Nations Unies. La chancelière soutenue par son premier ministre qui se croyait au-dessus du CPT affaibli par un scandale de corruption, n'y a pas mis les pieds. Conille a même écrit au président du CPT pour lui faire la leçon.


Dans sa lettre Garry Conille rappelle « que la procédure ne respecte pas les articles 156 et 159 de la Constitution amendée de la République d’Haïti ». Ces articles stipulent, selon la lettre, que le Premier Ministre est le chef du gouvernement et détient l'autorité, en collaboration avec le Président de la République, sur les membres du gouvernement. 
 
« Toute interaction formelle avec les ministres, y compris les convocations, doit être effectuée en concertation directe avec le Premier Ministre », avait écrit Conille.

Le chef du gouvernement allait signer son arrêt de mort lorsqu'il a commis la faute de demander publiquement la mise à l'écart des 3 conseillers indexés dans le scandale de la BNC comme condition pour tout remamiement de son gouvernement, reproché pour son absence de résultats, notamment en matière de sécurité. 
Alors que la présence de ces conseillers était critiquée par une large frange de la société, Leslie Voltaire en bon stratège n'en a pas donner suite, d'autant que légalement il ne pouvait le faire, les incriminés jouissant de la présomption d’innocence. La posture de Voltaire est plutôt compréhensible car pour faire sauter Conille, il fallait compter sur Louis Gérald Gilles, Smith Augustin et Emmanuel Vertilaire. D'ailleurs, ces derniers considèrent l’ex chef du gouvernement comme leur pire ennemi pour avoir lui-même introduit le dossier de la BNC à l'ULCC pour les faire tomber. 
Sous le signe du pragmatisme politique, Leslie Voltaire, contrairement à sa précédente position, a dans ce contexte décidé de protéger ses trois collègues pour avoir la tête d'un Conille qui se livrait dans une guerre ouverte avec le Conseil Présidentiel. 

Le premier ministre qui utilisait le dossier de la BNC pour conforter sa domination sur le Conseil n'a même pas eu le soutien du représentant de REN, structure de la société civile l'ayant désigné. Face au comportement jugé « arrogant » de Conille lors des dernières réunions avec le Conseil Présidentiel, Régine Abraham s'est aussi liguée contre lui et a contribué à l'évincer du pouvoir. Elle avait même claqué la porte d’une rencontre du CPT avec Conille.

Leslie Voltaire, comme il l’avait annoncé à New-York, a réussi à « couper les têtes » de Conille et de Dupuy. Le représentant de Fanmi Lavalas au CPT, faisant tomber le premier ministre, en a profité pour restaurer l'autorité de la présidence sur la Primature. Il a donc rapatrié le pouvoir au conseil présidentiel. Il laissera le pouvoir le 7 mars 2025 mais les choses ne seront plus comme avant. Un véritable coup de maitre.

La communauté internationale qu'on croyait être derrière l'ancien fonctionnaire des Nations Unies n'a eu d'autres choix que de respecter la décision du CPT. Leslie a intelligemment surfé sur la transition aux USA pour frapper, le département d'État américain sous l'administration Biden étant occupé à digérer leur défaite face à Donald Trump. Un momentum bien choisi. 

Cependant, la victoire de Leslie, Gilles, Augustin et Vertilaire sur Conille et le rapatriement du pouvoir au CPT est une arme à double tranchant. Si dans très peu de temps, la situation sécuritaire ne s'améliore pas et que les gangs continuent de régner et pourrir la vie des citoyens, le conseil risque de faire face à la colère de la population. Il n'y aura plus d'excuses pour le CPT détenant aujourd’hui tout le pouvoir avec ce nouveau cabinet ministériel. Il faut maintenant délivrer la marchandise qui n’est autre que le rétablissement de la sécurité, préalable à la reprise de la vie socio-économique et l’organisation des élections dans le pays. 

Leslie Voltaire qui a réussi ce coup politique fait partie de l'aile modéré du mouvement Lavalas. Son nom n'a jamais été mêlé à des affaires de corruption durant sa longue carrière au plus haut niveau de l’Etat ( ministre à deux reprises, chef de cabinet de l’ex président Aristide, etc .), cela lui confère une certaine autorité dans ses dernières prises de décisions. Mais le temps est grave. Sa responsabilité est grande. Une partie de la réussite de la transition est entre ses mains. Avec ses collègues du CPT, il doit monter la machine électorale ( BED, BEK dans les 10 départements), organiser la conférence nationale et réaliser un référendum indispensable à l'organisation des élections. Voltaire doit savoir que s'il rate ses 5 mois de mandat, Haïti rate cette transition. 

Des enjeux dont il semble mesurer l’ampleur si on se réfère à son intervention lors de l’investiture samedi 16 novembre 2024 du nouveau cabinet ministériel conduit par l’homme d’affaires Alix Didier Fils-Aimé.

« Vous portez une responsabilité historique envers la nation. Face à la crise, votre engagement sans faille est indispensable. Rétablir la sécurité, réussir le référendum, organiser les élections : ce sont des devoirs impératifs. Agissez avec transparence, et redonnez au peuple la confiance qu’il attend. Soyez à la hauteur. “Nou Vinn Minis Se pou Nou Bay Rezilta”. », a lancé Voltaire, s’adressant aux nouveaux ministres, après avoir fait savoir clairement au chef du gouvernement à l’occasion de la remise de l’ampliation lundi 11 novembre qu’il y a urgence à agir: 
« Le temps presse pour corriger ce qui doit l’être et réussir cette transition ». 

L’heure du bilan de Voltaire sonnera le 7 mars 2025. 

 

 


Par Gazette Haïti News

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