PubGazetteHaiti202005

12 ans après, Blondine et Nathalie subissent encore les traumatismes du séisme du 12 janvier 2010

Photo credit: ONU/Sophia Paris

Le violent séisme qui a secoué Haïti et sa capitale le 12 janvier 2010 a laissé des séquelles au sein de la population haïtienne déjà fragilisée par la violence, la pauvreté et aussi par des catastrophes naturelles répétées. 12 ans après la catastrophe, des familles vivent un véritable traumatisme. 12 ans après, la tragédie du 12 janvier 2010 est encore présent dans la tête des milliers Port-au-princiens. C'est le cas par exemple de Blondine Louidor et Nathalie Joseph, âgés respectivement de 31 ans et de 26 ans qui gardent encore en mémoire les séquelles provoquées par le monstrueux tremblement de terre.
 
Les Haïtiens gardent encore en mémoire le séisme du 12 janvier 2010 qui avait ravagé la capitale et plusieurs villes de province. Près de 300 000 personnes avaient été tuées et
autant de blessés lors de la catastrophe.
 
Blondine Louidor avait 19 ans quand elle a perdu tragiquement sa mère dans le tremblement de terre. « C’était un mardi, j’étais en classe terminale. Contrairement aux autres jours de la semaine, j’avais laissé la salle de classe bien avant l’heure pour  pouvoir rentrer chez moi parce que je ne me sentais pas trop bien. », raconte Blondine Louidor.
 
« J’étais en train de me reposer quand la terre  a  subitement commencé à trembler. En réalité, je ne savais pas ce qui se passait. Et tout à coup je me voyais sous les décombres. Quand j’ai repris mes esprits,  j’ai appris la nouvelle que ma maman était morte sous les décombres », se remémore-t-elle.
 
Depuis ce jour là, la date du 12 janvier est devenue pour elle une date cauchemardesque. Elle explique n’être toujours pas guérie de ses blessures. « Ma maman m'était très chère et chaque 12 janvier je me sens toujours mal. Je n’arrête pas de pleurer », raconte Blondine Louidor qui se dit incapable de se passer jusqu’à présent des habitudes de sa défunte mère. 
 
La situation n’est pas différente pour Nathalie Joseph qui dit ne pas se rappeler jusqu’à présent comment elle est sortie vivante du séisme du 12 janvier 2010. 
 
« On a été relâché brusquement de l’école parce que quelqu’un de très connu a été tué dans la zone. J'ai laissé la Rue Capois pour me rendre chez moi au bas de la ville à la rue Dr Aubry. J’étais en pleine rue quand la terre a commencé à trembler. Je me suis mise rapidement à l’abri sous le toit d’une pompe funèbre et d’un coup j’étais déjà sous les décombres », raconte Nathalie Joseph.
 
« J’avais toute ma lucidité quand j’étais sous les décombres », se souvient Nathalie qui affirme être toujours dans l’impossibilité de se rappeler à quel moment qu’elle est revenue sur terre. « J’ai aucun souvenir réel de ce qui s’est passé ce jour-là sous les décombres. (Je filais en vitesse chez moi et quand j’ai eu la conscience de mon entourage, je me suis rendu compte maintenant que je ne pouvais plus bouger. ») poursuit-elle.

 
« Il n’y a pas eu de morts dans mon entourage immédiat mais jusqu’à présent je ne suis pas encore guérie du traumatisme provoqué par ce séisme. », confie-t-elle. 
 
« Je suis claustrophobe depuis le séisme du 12 janvier 2010. Je ne supporte pas les espaces fermés, poursuit Nathalie. Dès que je rentre dans une pièce, j’essaie de repérer les sorties. Et depuis le dernier séisme du 14 août 2021, mon cas s’est aggravé à tel point que  je n’arrivais pas à m'endormir le soir. »
 
Réactivation du trauma
 
Selon le psychologue Adler Saturné, le séisme du 12 janvier 2010 a laissé pas mal de traumatismes. La réactivation du trauma peut se traduire de différentes manières, d’après le psychologue.  
 
« Les manifestations psychiques c’est comme une trace laissée par l’évènement. Lorsque les blessures sont cicatrisées, elles sont susceptibles d’être rouvertes, c’est-à-dire certains moments peuvent créer des sensations difficiles où la personne revit ces mêmes situations. La personne peut avoir des cauchemars ou des illusions sensorielles qui lui font revivre la même souffrance, ou détresse vécue lors du tremblement de terre.», explique-t-il.
 
Ainsi, dit-il, n’importe quel événement peut déclencher cette réactivation traumatique. Par exemple, à l’occasion de la célébration de l’anniversaire de l’évènement si la personne se retrouve dans une situation identique, les souvenirs peuvent encore refaire surface et créent cette douleur intense que la personne avait vécue lors du premier évènement.
 
Qu’est-ce que la personne doit faire dans ce cas pour laisser derrière elle les souvenirs malheureux de cet évènement ?
 
Selon le psychologue Saturné, la première chose ou l’entourage de la personne doit faire, c’est de consulter un spécialiste qui va pouvoir utiliser des méthodes appropriées pour aider la personne. La deuxième chose, c’est de pousser la personne vers une acceptation de l’évènement, permettre à la personne de savoir qu’elle a été choquée par cet évènement. La troisième chose, c’est de faire une approche comportementale qui va aider la personne à diminuer les comportements négatifs, les émotions négatives, les pensées négatives et les sentiments négatifs par exemple le sentiment de culpabilité, de regret et de remords.
 
Plus d'un million et demi d'Haïtiens s'étaient ensuite retrouvés sans logis, plaçant les autorités haïtiennes et la communauté humanitaire internationale devant le colossal défi d'une reconstruction dans un pays sans cadastre ni règles de bâtisse.
 
12 ans après ce cataclysme, le pays est plongé dans une véritable crise sociopolitique et économique. 12 ans après, des milliers de personnes vivent encore avec un handicap ou un traumatisme.


Fenel Pélissier

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