
Lors d’une cérémonie dans les locaux du conseil electoral provisoire a petion ville, ce lundi 13 octobre 2025 Jacques Desrosiers a été installé, comme nouveau président du Conseil électoral provisoire (CEP), suite à la démission de Patrick Saint-Hilaire.
Le départ du représentant de la Conférence épiscopale d’Haïti (CEH) a ouvert la voie à une nouvelle direction du CEP. Dans son discours d’adieu, l’ancien président a tenu à souligner le sens de sa démarche, empreinte de responsabilité et non d’abandon.
« J’arrive au terme de ma période de gestion du Conseil électoral provisoire, suite à ma démission mûrement réfléchie. Je n’ai pas démissionné devant les difficultés qui entourent le processus électoral », a-t-il déclaré, rappelant son attachement aux valeurs de transparence et d’intégrité. Dans un ton solennel, il a cité une expression latine pleine de sens : « non perdidi diem (je n’ai pas perdu ma journée) » pour signifier qu’il quitte ses fonctions avec la conscience du devoir accompli.
Le relais est désormais assuré par Jacques Desrosiers, représentant du secteur de la presse. L’élection de l’ancien secrétaire général de l’ANMH à la présidence du CEP a été saluée par un public composé de diplomates, de représentants du gouvernement et d’organisations internationales, telles que le PNUD et le BINUH, témoignant du soutien attentif de la communauté internationale au processus électoral haïtien.
Dans son discours d’investiture, Desrosiers a promis d’insuffler un nouvel élan à l’institution. « Nous allons consolider les acquis et apporter le souffle nécessaire à la bonne marche du CEP », a-t-il affirmé. Pour lui, le renouveau électoral passe par trois principes essentiels : la transparence, la responsabilité et l’innovation.
Il a également insisté sur la collégialité comme méthode de gouvernance. « Je crois fermement au caractère collectif de notre conseil. Chaque membre apportera sa vision, ses compétences et son expertise. C’est grâce à cette diversité que nous pourrons atteindre nos objectifs communs », a-t-il déclaré, prônant un leadership participatif et inclusif.
Aux côtés du nouveau président, le bureau du CEP compte Me Jaccéus Joseph, représentant du secteur paysan, en tant que vice-président, Peterson Pierre-Louis, représentant du secteur protestant, comme secrétaire, et Nemrod Sanon, du secteur syndical, en qualité de trésorier.
Le reste du conseil reflète également la diversité du tissu social haïtien : Schnaïda Adely représente le secteur vaudou, Yves Marie Édouard, celui des femmes, Rose Thérèse Magalie Georges, les droits humains et Marie Florence Mathieu, le secteur universitaire.
Cette pluralité est perçue comme un atout pour l’équilibre institutionnel, même si certains observateurs demeurent prudents. Beaucoup s’interrogent encore sur la capacité du CEP à mener à bien sa mission dans un contexte dominé par la violence armée, la fragilité institutionnelle et la méfiance citoyenne.
Aucune date officielle pour la tenue des élections n’a encore été fixée. Toutefois, Jacques Desrosiers s’est engagé à travailler à un calendrier électoral « réaliste et consensuel ». Son objectif est clair : « permettre au peuple haïtien d’exprimer librement sa volonté ».
Mais la tâche s’annonce immense. Dans plusieurs départements, notamment dans l’Ouest et l’Artibonite, les gangs continuent d’exercer un contrôle territorial qui rend tout déploiement logistique extrêmement difficile. Les infrastructures électorales sont en grande partie détruites, et les ressources financières restent limitées.
Des experts estiment qu’un délai d’au moins huit mois serait nécessaire pour organiser un scrutin crédible. Ces obstacles n’altèrent toutefois pas la détermination du nouveau président, qui mise sur le dialogue et la concertation pour surmonter les blocages.
Le Conseil présidentiel de transition (CPT), actuellement au pouvoir, a réitéré son engagement à organiser des élections avant la fin de son mandat, prévu pour le 7 février 2026. Cependant, pour nombre d’Haïtiens, cette promesse reste teintée d’incertitude.
Les scrutins passés ont souvent été ternis par des allégations de fraude et de manipulation. La crédibilité du nouveau Conseil dépendra donc largement de sa capacité à rompre avec les pratiques du passé.
Jacques Desrosiers l’a martelé dans son discours : la légitimité du processus électoral repose avant tout sur la confiance. Pour la regagner, il promet d’instaurer une gouvernance basée sur la transparence, la communication et la participation.
« Nous devons redonner au peuple la confiance qu’il a perdue dans le vote », a-t-il souligné. Ce message s’adresse autant aux citoyens qu’aux acteurs politiques et à la communauté internationale.
Le nouveau président du CEP sait que sa réussite dépendra autant de sa capacité à mobiliser les institutions nationales que de celle à rassurer les bailleurs internationaux. Dans un pays en quête de stabilité, chaque mot, chaque geste compte.
« Nous ne pouvons pas demander au peuple de croire à la démocratie si nous ne lui prouvons pas qu’elle peut fonctionner », a conclu Desrosiers.
Par Arnold Junior Pierre
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