
Face à la montée de l’insécurité dans la région métropolitaine de Port-au-Prince, Médecins Sans Frontières (MSF) a annoncé, le mardi 8 avril 2025, la suspension de ses services dans deux centres médicaux majeurs : le Centre d’urgence de Turgeau et l’hôpital traumatologique de Carrefour. Cette décision fait suite à une attaque armée survenue le 15 mars, au cours de laquelle un convoi de MSF a essuyé une quinzaine de tirs. L’organisation humanitaire affirme qu’elle reprendra ses activités dès que les conditions de sécurité le permettront.
À Turgeau, les services étaient déjà inopérationnels depuis l’attaque du 15 mars. Avec cette nouvelle décision, MSF vient confirmer l’inactivité prolongée dans ces deux structures essentielles. La suspension est annoncée pour une durée minimale de trois mois.
Dans un communiqué, l’ONG revient sur les circonstances de cette attaque. Ce jour-là, alors que les affrontements armés se rapprochaient dangereusement du quartier de Turgeau, un convoi de MSF évacuant du personnel a été délibérément pris pour cible. Les véhicules, pourtant clairement identifiés comme appartenant à l’organisation, ont été criblés d’une quinzaine de balles. Un homme armé, cagoulé et en uniforme, aurait ouvert le feu sur la seule route reliant les deux centres de soins.
Les structures de Turgeau et de Carrefour sont étroitement interconnectées dans leur fonctionnement quotidien. L’impossibilité d’utiliser la route qui les relie compromet gravement le transfert des patients, la circulation du personnel médical et l’acheminement des fournitures.
Dans son communiqué, MSF informe qu’elle se retire officiellement de ces deux sites à compter du 9 avril. Elle réaffirme son attachement à Haïti mais insiste sur la nécessité de protéger ses équipes. L’organisation rappelle que l’attaque du 15 mars est le deuxième incident grave en quatre mois, après une précédente suspension de trois semaines en novembre 2024 à la suite de menaces répétées.
MSF renouvelle son appel aux groupes armés et aux autorités pour qu’ils respectent les structures médicales, les ambulances, les patients et le personnel soignant. « La souffrance extrême de la population rend cette décision d’autant plus douloureuse, mais aucun médecin décédé ni infirmier blessé ne peut soigner des patients en détresse », a souligné Benoît Vasseur, représentant de l’organisation.
Malgré ce retrait, MSF annonce le maintien de ses activités dans le Sud d’Haïti et dans d’autres zones de la capitale, notamment à Tabarre et à Cité Soleil.
Ce retrait laisse néanmoins un vide critique dans l’accès aux soins pour une population déjà extrêmement vulnérable. En plein cœur de Port-au-Prince, la plupart des hôpitaux sont quasiment dysfonctionnels. Depuis février 2024, l’Hôpital de l’Université d’État d’Haïti (HUEH), le plus grand centre hospitalier public du pays, a fermé ses portes en raison des violences des gangs. L’hôpital Bernard Mevs, bien que privé et offrant des services spécialisés, a également été ciblé par des attaques armées. À Delmas, l’un des rares hôpitaux publics encore fonctionnels, Hôpital La Paix est saturé de patients.
Wideberlin SENEXANT
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