PubGazetteHaiti202005

EDITORIAL:- 18 mai Au Cap Haïtien: Ariel Henry a tout gagné, alors que Moïse a tout perdu

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Dans la vie comme en politique on peut toujours jouer « au qui perd gagne ». Cela peut se révéler payant, mais certaines fois on ne gagne rien en perdant.
Une illustration parfaite de ce qui s'est passé au Cap-Haïtien à l’occasion du 220ème anniversaire du drapeau, ce 18 mai avec le leader de Pitit Dessalines.

En effet, depuis l'accession au pouvoir du Dr Ariel Henry, il n’avait jamais réussi jusque-là à mettre les pieds dans un lieu historique pour commémorer ou célébrer une date marquant notre histoire de peuple. Sa première tentative de commémorer l'assassinat de Dessalines le 17 octobre 2021 au Pont-Rouge avait piteusement échoué. En dépit d'un grand dispositif de sécurité mis en place ce jour-là, le cortège du premier ministre avait été repoussé par le gang G9 dirigé par Jimmy Chérisier alias Barbecue qui, à la place des autorités, avait déposé une gerbe de fleurs tout en accusant Ariel Henry dans l'assassinat de du président Jovenel Moïse.

Est venu ensuite le moment de célébrer les 218 ans d'indépendance d'Haïti aux Gonaïves le 1er janvier 2022. On s'en souvient. Déterminé à prouver que l'état qu'il dirige depuis l'assassinat de Jovenel Moïse détient le monopole de la violence, il s'y est quand même rendu en dépit des menaces et son cortège a essuyé des tirs d'armes automatiques. Après avoir assisté au Tedéum à la Cathédrale des Gonaïves sous haute escorte policière même à l'intérieur de l'église, le premier ministre a dû filer à l'anglaise sous une pluie de balles sans pouvoir prononcer le traditionnel discours sur la place d'armes de la Cité de l'indépendance. 
S’ il avait réussi en bravant le danger pour se rendre aux Gonaïves, le premier ministre avait échoué de n’avoir pas pu prendre la parole comme le veut la tradition. 

En 2022, ne voulant plus faire les mêmes expériences, Ariel Henry, a préféré célébrer ces dates au Musée et au Palais, là où il y a moins de risque ou pas du tout.

Totalement affaibli en 2023 en raison de l'aggravation de la situation du pays marquée par une crise sécuritaire et économique, il a évité de se rendre à l’Arcahaie, la zone étant contrôlée par les gangs armés. Il a opté pour le Cap Haïtien. Là, il s'est trouvé un grand allié sur lequel il pouvait compter. Nous l'avions assumé, Ariel Henry ne pouvait se rendre au Cap pour la fête du drapeau sans l'aval de Jean Charles Moïse, détenteur d'une grande capacité de nuisance dans la région.

Le leader de Pitit Dessalines peut continuer à le nier mais ne convainc plus personne sur ce dossier. Ses dernières déclarations à ce sujet ont plutôt confirmé les rumeurs. Le leader de Pitit Dessalines, celui qui  récemment appelait à brûler les banques à cause de la hausse du dollar est devenu aujourd’hui comme par magie l’apôtre de la paix. 

On peut affirmer sans l’ombre d’un doute que grâce au support de l’ex sénateur de la république, le gouvernement a célébré la fête du drapeau au Cap-Haïtien et dans l'ensemble tout s'est passé. 

Maitenant, faisons le décompte: à l'occasion de la fête du drapeau célébré par la force des choses au Cap Haïtien, des deux « compères en sourdine » dit-on, l’un a gagné et l'autre a perdu, du moins pour le moment, car en politique, les données changent à tout moment. Même s'il aurait effectivement reçu de l'argent du gouvernement, politiquement Moïse en est sorti totalement affaibli.

Qu'il soit clair, le grand gagant de cette célébration du bicolore au Cap Haïtien est bien Ariel Henry. La ville étant neutralisée puisque Moïse n'a pas décidé de contester la présence du gouvernement dans son fief, le cortège du chef du pouvoir déambulait dans les rues du Cap depuis la veille. Pas de panique, tout était sous contrôle. Ayant toute la garantie que rien n'allait lui arriver, Ariel Henry a assisté au Tédeum à la Cathédrale, rencontré les Casecs, assisté aux parades, fait son discours et est rentré à Port-au-Prince sans grandes difficultés laissant Moïse avec son lot de problèmes. 

Dans cette histoire, le leader de Pitit Dessalines, même s'il aurait effectivement reçu de l'argent du pouvoir, est sorti totalement affaibli de cette aventure politique perilleuse. Il est accusé d'avoir été monnayé pour pacifier la ville, a perdu de ses plus fidèles alliés au sein du parti et dans les médias. Sur les réseaux sociaux on le descend en flamme. Il est critiqué, vilipendé et traité d’agent double. Le plus dur des coups est venu de Nicholson Pierre dit Bab, un militant jadis acquis à sa cause. Totalement désapointé par le comportement de son leader, Bab pète les plombs et envisage de quitter Pitit Dessalines. Le tonitruant militant politique ayant connu la prison accuse Moïse d'avoir trahi la lutte du peuple pour de l'argent. Il croit dur comme fer que son leader a été payé par Ariel Henry. Au Cap Haïtien et dans les Nippes plusieurs membres du parti ont aussi claqué la porte. Depuis le règne de Jovenel Moïse, Jean Charles Moïse a toujours été accusé à tort ou à raison de jouer le double-jeu. 

Devant cette pluie de criques, le leader de Pitit Dessalines a tenté vainement de se défendre. Il est allé jusqu'a s'en prendre à certains journalistes considérés jadis par plus d'un comme ses fervents supporteurs. Comme dans ses habitudes, si quelqu'un critique Moïse ou questionne ses démarches politiques le plus souvent très questionnable, soit vous êtes le pion des ambassades, soit vous êtes monnayés ou le haissez en raison de ses origines paysannes.

Ce vendredi sur le Boulevard de Radio Caraïbes, Jean Charles Moïse a directement au journaliste Lydie Alexandre qu'il accuse de travailler pour le secteur démocratique et populaire ( SDP) en raison d'une relation amoureuse qu'elle aurait avec Luc Wench, directeur de la Loterie d'Etat d'Haïti, proche de ce secteur politique. Les militants qui ont démissionné du parti dont le très connu Nicholson Pierre ont aussi été accusés de faire le jeu de ses ennemis.


Jean Charles Moïse qui ne faisait l’objet d'aucun soupçon lorsqu'il menait la lutte contre Martelly est devenu très questionnable depuis le règne de du feu président Jovenel Moïse. Il est obligé à chaque fois de monter au créneau pour se laver des accusations les unes plus louches que d'autres. 

Tout compte fait, le grand gagnant politiquement de cette affaire n'est autre que Ariel Henry. La réputation de Moïse Jean Charles, qui jouissait d'une certaine symphatie au niveau de la population en raison des causes qu'il disait défendre, est sérieusement ternie. 

Comment pourra-il remonter cette pente scabreuse ?  L'avenir le dira. 

 

 

Par Gazette Haïti

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