PubGazetteHaiti202005

Edgard Leblanc: « La fête du drapeau doit nous rappeler qu’il n’y a pas de territoires perdus »

Edgard Leblanc Fils, président du CPT

Ce samedi 18 mai, la fête du drapeau et de l’université a été célébrée à Port-au-Prince à la Villa d’accueil. Le Conseil Présidentiel de Transition et le gouvernement démissionnaire ont choisi cette année de commémorer le bicolore national dans la capitale, en raison de l’occupation de la Côte des Archadins par des gangs armés. Dans son discours de circonstance, le président du Conseil Présidentiel Edgard Leblanc Fils promet la sécurité à toute la population. 

Dès l’aube, la Villa d’accueil  a pris des airs de cérémonie solennelle, préparée pour accueillir les grands commis de l’État et plusieurs membres du corps diplomatique, parmi lesquels l’ambassadeur américain Denis Hankins, le représentant du Canada Guy Roux, et l’ambassadeur de Taïwan Wenn Jian Ku. L’absence de l’Arcahaie, lieu traditionnel de cette célébration, a jeté une ombre sur les festivités, rappelant la crise sécuritaire qui secoue Haïti.

Autrefois symbole de la fête du drapeau, la commune de l’Arcahaie est désormais sous la menace des gangs armés. Le gang de Canaan, avec l’appui d’autres gangs redoutables, maintient une emprise sur cette région stratégique et les principales routes la traversant, empêchant ainsi toute cérémonie officielle dans ce lieu emblématique.

Prévue pour commencer à 8h, la cérémonie à la Villa d’accueil a débuté avec un léger retard. À 8h30, les membres du Conseil Présidentiel de Transition, Edgard Leblanc Fils, Louis Gérald Gilles, Lesly Voltaire, Frinel Joseph, tout de blanc vêtus et affichant une assurance certaine, ont pris place sur l’estrade décorée en bleu et rouge, suivis des invités de marque. Le début de la commémoration a été marqué par une prestation musicale de haute qualité, une troupe interprétant deux morceaux, dont l’émouvant « Lè n va libere, Ayiti va bèl », suscitant un sentiment de fierté nationale et d’espoir.

L’agente intérimaire de Tabarre, Nice Simon, a été la première à prendre la parole. Dans un discours critique, elle a évoqué l'écart grandissant entre les idéaux de nos ancêtres et la réalité actuelle d'Haïti. Elle a dénoncé les luttes intestines et les intérêts personnels qui prennent le pas sur les intérêts supérieurs de la nation. Nice Simon a appelé à l’unité pour sortir Haïti de cette situation périlleuse, soulignant que l'État ne contrôle plus « l'intégralité du territoire ».

« Il faut recoudre le drapeau national. Il y a urgence. Nous sommes en quête, ça fait longtemps, de ce sursaut national pour faire le compte de notre destin de peuple et conclure que nous avons fait fausse route. C’est l’occasion de nous réorienter », a déclaré Nice Simon avec insistance.

Le recteur de l’Université d’État d’Haïti, Fritz Deshommes, a ensuite pris la parole, se concentrant sur les énormes difficultés auxquelles l'UEH est confrontée. Il a décrit avec tristesse comment les entités de l'université ont été pillées, incendiées et occupées par des bandits. M. Deshommes a esquissé un tableau sombre d’un système éducatif pratiquement dysfonctionnel où des écoliers et étudiants peinent à recevoir le pain de l’instruction.

Malgré ces défis, Deshommes a affirmé la détermination de l'UEH à continuer de jouer son rôle crucial de guide et de lumière pour la société haïtienne. « Ce drapeau a aidé à créer beaucoup d’autres drapeaux. Ce drapeau symbolise la liberté pour nous et beaucoup d’autres peuples », a déclaré Fritz Deshommes, appelant à ne pas baisser les bras parce que nos ancêtres,rappelle-t-il, ont vécu pire.

M. Deshommes a rappelé que le pays que nous avons actuellement diffère complètement de celui façonné par les ancêtres ou encore de la constitution de 1987 amendée qui évoque un État décentralisé et souverain. 

Michel Patrick Bois-Vert, le Premier Ministre intérimaire, a exprimé ses regrets face à la crise persistante qui éclipse la portée de cette journée symbolique. Il a souligné l'urgence de mettre fin aux querelles politiques pour donner la priorité à Haïti et à son avenir.

« Les travaux et les appels de nos écrivains et historiens ont été très peu entendus jusqu’ici. Et c’est l’occasion pour nous de leur manifester notre reconnaissance et de les encourager à continuer l’œuvre de divulgation de notre histoire et de faire connaître à la jeunesse et au monde entier l’esprit de liberté, de paix et le besoin de démocratie qui habitent et caractérisent le pays », a déclaré le chef du gouvernement intérimaire. Bois-Vert a insisté sur la nécessité d'une coopération pour sortir le pays de la crise.

Sur l’université, Bois-Vert estime qu’elle se révèle être cette force morale que détient la jeunesse pour la sauvegarde de l’unité de la patrie, des valeurs civiques et des vertus citoyennes. « L’université est ce porte-étendard qui nous rappelle ce que nous sommes et ce que nous voulons être. J’en appelle au développement d’une université qui puisse jouer son rôle dans la refondation de la patrie, dans la construction du dialogue national et de la gestion du pays », a soutenu Bois-Vert, appelant à un meilleur outillage de l’université.

Le point culminant de la cérémonie a été le discours du Président du Conseil Présidentiel de Transition, Edgard Leblanc Fils. L’ex sénateur a reconnu que ce 18 mai se déroule dans l’une des périodes les plus sombres de l’histoire haïtienne. Il a souligné que l’union nationale reste un vœu pieux, souvent limité aux discours. Leblanc a appelé à redonner au drapeau haïtien sa signification profonde et à briser le cycle de crises récurrentes. « Il nous faut un nouveau départ », a-t-il souhaité, « pour que l’esprit du drapeau se concrétise dans les faits ».

« Notre drapeau doit devenir le signe de ralliement autour d’un grand kombit pour remettre en vie notre corps social en proie depuis des années à d’atroces convulsions », a poursuivi Leblanc, reconnaissant que la population perd espoir « jour après jour ».

Edgard Leblanc a subtilement critiqué les administrations passées en indiquant que « tout a été fait pour porter la population au découragement, à la fuite et à la démission », prenant comme exemple les migrations explosives constatées ces dernières années.

« Pas de territoires perdus »

Dans son discours, Edgard Leblanc a touché l’épineuse question de la souveraineté. Il a estimé que le drapeau symbolise la souveraineté qui, elle-même, ne peut qu’être un concept sans aucun sens si la sécurité n’est pas rétablie dans le pays. « L’insécurité est le pire ennemi de l’union, et donc du drapeau », a-t-il fait savoir. 

En ce sens, Leblanc a insisté sur la nécessité urgente de résoudre la crise de l’insécurité pour permettre aux citoyens de vivre et de travailler en paix. « La fête du drapeau doit nous rappeler aussi qu’il n’y a pas de territoires perdus. Chaque mètre de notre territoire est la possession de l’État haïtien », a déclaré Leblanc. Le drapeau haïtien, symbole de l’autorité de l’État, flottera partout bientôt pour bien signifier que le règne de l’insécurité permanente prend fin », a-t-il martelé, en présence de la ministre de la justice et de la sécurité Emmelie Prophète, visiblement gênée. 

Son appel résonne comme un cri de ralliement pour tous les Haïtiens, invitant chacun à participer à la reconstruction d'une Haïti stable et prospère.

La commémoration de la fête du drapeau, bien que marquée par les ombres de la crise actuelle, a été une occasion pour les dirigeants de réaffirmer leur engagement envers l'unité et la paix.

Cette commémoration de la fête du drapeau, symbole de la souveraineté, survient à quelques jours du déploiement des troupes kenyanes en Haïti, prévu la fin de ce mois. 

 

 


Par: Daniel Zéphyr

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