PubGazetteHaiti202005

Dans la splendeur de la nuit de Dany Laferrière

Dans la splendeur de la nuit de Dany Laferrière

Dans un recueil de poème aux accents de mage de la littérature francophone, le poète académicien Dany Laferrière vient de déposer de façon extraordinaire en retournant à ses premiers amours, la poésie. Un recueil du même nom, c’est un voyage au cœur de la nuit, dont chaque page fait sens, au sens poétique du terme. Sur plus de 140 pages, l’académicien aligne ses métaphores, dont il dresse des balises de scansions, mais surtout des procès-verbaux poétiques, qui ont du mordant. Par ailleurs la magie s’opère dès la première page avec cette rentrée en matière tout en fanfare dont son pays est une illustration parfaite, qui a dit qu’il n’y pas de poésie authentique, sans avoir beaucoup voyagé, vu et avoir vécu. A cet aune l’académicien Dany Laferrière a des ressources avouables et avouées que l’on peut contempler dans chacune de ses salves. Il convoque le lecteur de s’y installer poétiquement car dans certaines pages les conciliabules poétiques de l’auteur décoiffent sérieusement.

 
En tout cas, il n’a rien perdu de ses attraits poétiques; les vers libres ici s’expriment de manière imagée avec un rythme soutenu qui ne doit rien à la routine. Dans ce recueil, le poète fait jaillir un chant poétique captivant, émouvant, capable de clouer sur place, n’importe quel récalcitrant endurci, qui n’a jamais goûté aux charmes sans fin de la poésie constructive. Celle que nous présente Dany Laferrière est tout en rondeur et se juxtapose dans un lyrisme débordant de bruits et de fureurs, bref la vie quoi!  Celle qui ne se laisse pas conter dont nous sommes obligés de contempler ses interstices malicieux. Dans cette merveille poétique qui se dessine à chaque page, l’académicien fait surgir un moi poétique que les lecteurs de ses romans reconnaissent entre mille. Se dessinent en filigrane beaucoup de Charmes des après-midis sans fin et des tonitruantes rencontres qui fortifient les descriptions poétiques de l’académicien :

 

L’académicien Dany Laferrière n’est pas seulement un romancier plein de charme, il est aussi bon poète même si cela fait longtemps qu’il ne nous avait pas gratifié d’un recueil de poésie. C’est désormais chose faite. Avec « La splendeur de la nuit » l’académicien Haïtiano-canadïen vient de prouver qu’il n’avait rien perdu de ses attraits poétiques. Ses métaphores brillent dans les nuits de n’importe quelle capitale, cela dépend où il est et ça marche du tonnerre. C’est un recueil sans grande prétention mais qui est habité par un désir de doublement raconter. D’abord les mots et les dessins qui vont avec sont loin d’être inutiles pour apprécier à leur juste valeur les métaphores scintillantes de calembours du romancier Dany Laferrière. La nuit est déjà un terme poétique chargé de mystères et de sortilèges les plus emphatiques. Explorer ces mystères est pour l’écrivain une occasion en or de méditer sur ce que l’on ne voit et ne comprend pas. L’association entre livres et nuits sont chez Dany Laferrière deux ingrédients qui vont dans le même sens, et l’occasion est trop belle pour ne pas les associer, dans une seule et même valse poétique pour dire sa compréhension de ce fameux mystère qu’est la nuit. Un voyage poétique qui ne souffre d’aucune approximation. Par ailleurs deux passions s’additionnent chez l’auteur, dans l’objectif de faire éclater sa magie poétique. La nuit et une bibliothèque bien achalandée et la litote pour les faire asseoir au même endroit voire même de les compulser dans un seul mouvement pour accoucher du sublime. 

Voilà un pari que l’académicien a réussi haut la main   
Les gens pensent
Que les livres restent
Dans la bibliothèque la nuit
Alors qu’ils partent
à la recherche des lecteurs endormis.
C’est ainsi qu’on se
réveille le matin avec
le goût d’un récit
sur les lèvres
Je ne sais plus quand
Les lettres de l’alphabet
se sont infiltrées en moi
pour faire de ma vie
celle d’un lettré gorgé d’encre
avec un filet de sang. »

On l’imagine, les pieds dans le tapis de sa table d’écrivain, cherchant inlassablement une sonorité métaphorique, des scansions en rafales pour faire briller une pensée poétique, qui saura séduire n’importe quel lecteur ou lectrice à la recherche d’une martingale puissante pour abriter des désarrois amoureux ou autres. Les recettes sont bel et bien là, alignées dans des pensées philosophico- poétiques à foison. L’académicien a pris ses plus belles dentelles pour voyager la nuit. Chez nous, la nuit tous les chats sont gris, mais celui du romancier haïtien s’était déjà matérialisé dans un très beau livre, dont le titre vous plonge dans l’univers singulier du romancier haïtien « Autoportrait Paris avec Chat », est un roman illustré que l’écrivain a lui-même dessiné, le tout écrit à la main. C’est exactement la même chose pour ce recueil de poésie où Dany Laferrière dessine avec de grandes enjambées ses pensées poétiques. La nuit ou encore des nuits où ses pensées flânent d’une rue à une avenue de la capitale française avec toujours les mêmes dévotions poétiques. Celles-ci s’épanouissent dans d’autres villes, avec la même topographie descriptive et la même témérité a capté l’âme humaine dans toutes ses splendeurs. La nuit est-elle le meilleur moment pour s’adonner dans cette contemplation à laquelle nous convie notre académicien.        
Je retourne à la nuit.
Je me suis retrouvé au
Milieu d’une foule.
Les gens me frôlaient.
Je les ai entendus, sans le voir,
Raconter leur journée. Le
bruissement des voix, tous
Ces corps en sueur
Qui se frottent
à ma peau
me donnaient
l’impression
de traverser
une rivière.
Un long
moment de
douce fraicheur. »

D’une pensée à l’autre l’académicien déploie ses ailes poétiques avec beaucoup de candeurs. Il nous promène avec des métaphores bien construites et accessibles à tous. Chaque salve, il raconte ses nuits, ses rencontres, et la splendeur de chaque instant passé dans une vie, il savourait et il savoure encore. Paris, Port au Prince Montréal sont évidemment omniprésentes. C’est subtil mais il suffit d’être un peu curieux pour comprendre que certaines métaphores s’adressent indirectement à ces villes dont il reconnait chaque pas, chaque rue, chaque café ou encore chaque personnage. Dany Laferrière se met dans les pas de ces grands écrivains que Paris avait fascinés. Ce recueil de poésie est vraiment amusant à tout point de vue, joliment dessiné avec des phrases courtes, des mots dont les caractéristiques sont simples comme bonjour amusants et très fantaisistes. L’académicien se jette à l’eau non pas avec désinvolture, mais plutôt de manière dépouillée pour laisser entrer une simplicité de bon aloi.          
 
 

Par Maguet Delva

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